1996 – Inch’Allah

inchallah
Genre :
Journal Intime
Editeur : Éditions du Rocher
Date de parution : septembre 1996
Nombre de pages : 962
ISBN : 2-268-02297-8


Quatrième de couverture

Le journal intime est une entreprise de resurrection, j’espère que je n’apprends rien à personne. Le diariste passe le temps, en direct, comme aucune média ne le peut. La télévision n’a fait qu’une bouchée du roman : pour avaler le journal, ça lui sera difficile. L’essentiel est de recouvrir la vie, cette petite fille qui se déborde la nuit quand elle rêve.


Extrait

Jeudi 18 février 1988. – Le procès d’Action directe se passe très mal. Les terroristes font la grève de la faim. Chalandon ne veut pas céder. Quelle tragédie de voir ces paumés se laisser mourir alors que le July repu pavoise en gras boss à havane !
Nathalie Ménigon en est à son soixante-dix-neuvième jour d’inanition. C’est sur un fauteuil roulant qu’on l’a amenée ce matin au Palais de Justice… On lui repasse le film de sa vie gangstérique (j’apprends qu’elle a eu le BEPC comme moi et qu’elle a fait six ans de piano comme moi aussi) : ça doit lui faire drôle dans cet état de faiblesse ! « Doigts-de-fée » tient si peu debout qu’assise sur le banc des accusés, elle s’écroule pendant l’audience, on la perfuse, mais les juges veulent en finir : c’est la première fois qu’on condamne à douze ans de prison ferme une femme sous perfusion ! Il faut dire que c’est une terroriste « ravagée par une angoisse profonde après la mort de sa mère », comme dit le psychiatre : Très émotive. Dangereuse. Et c’est très rare que je marque « dangereuse » dans un rapport. Dangereuse… Très émotive… Ça me rappelle quelqu’un… Ça me rappelle tout ceux et toutes celles que je respecte sur cette terre !
Vu Queen Kelly, le dernier film (inachevé) de Erich Von Stroheim réalisateur. C’est des bribes, mes quelles bribes : comme des morceaux de miroir brisé, ça n’empêche pas de se voir dans chacun, quelle que soit sa forme. C’était pourtant bien parti : en 1928, Joe Kennedy donne le feu vert à Von Stroh pour un nouveau film avec Gloria Swanson. Elle est un peu vieille pour le rôle, mais ça va : Patricia Kelly, une orpheline irlandaise, est enlevée un peu cavalièrement de son couvent par un prince, elle réussit à le fuir d’autant plus loin qu’elle vient d’hériter de sa tante d’un bordel en Afrique. Le prince retrouvera plus tard cette « reine Kelly » dans son marigot où ils vivront heureux… Peu de choses ont été tournées, mais le scabreux du scénario (une catholique qui finit chez les Nègres) et l’envahissement du parlant firent capoter le projet. Stroheim en resta muet de désespoir jusqu’à Sunset Boulevard (1949) où l’échec de Queen Kelly est mis en scène : il hésita paraît-il, à jouer son propre personnage caricaturé d’ex-cinéaste devenu majordome de la Swanson destroy, mais il a bien fait d’accepter. Gloria et lui avaient passé l’éponge en vingt ans : tous les deux en avaient assez bavé sur Hollywood…
À part la fameuse scène où la petite bonne sœur perd sa culotte et la lance au visage du prince qui la hume en riant (très osé et pas seulement pour l’époque), il y a surtout à ne jamais oublier le mariage de Kelly avec le planteur ataxique qui bave sur le lit de mort de sa tante en Afrique ! Mariage religieux, béni par un prêtre noir ! Dommage, la scène du bordel en folie (inédite) manque à cette version du mélo transfiguré… il y avait là paraît-il, une terrible saccade de plans fous.
p.2464-246
Compétences

Posté le

1 avril 2015